La viabilité du système public d’enseignement postsecondaire de l’Ontario : Assembler toutes les pièces

Consultez notre page consacrée à la viabilité pour en apprendre davantage sur les recherches du COQES à ce sujet.

Le maintien de la qualité de l’enseignement supérieur n’est pas uniquement une question d’équilibre budgétaire

Alors que les universités et collèges de l’Ontario doivent composer avec la hausse des dépenses et la stagnation des revenus, la qualité de l’enseignement pourrait être compromise, souligne un nouveau rapport du Conseil ontarien de la qualité de l’enseignement supérieur (COQES).

Le document examine les résultats d’analyses raisonnées antérieures du COQES, qui font état du problème de viabilité auquel font face les établissements d’enseignement postsecondaire de la province, et définit un nombre de leviers pour le surmonter. 

La stagnation des taux d’inscription d’étudiants locaux dans la plupart des régions de la province, à l’exception de la région du Grand Toronto, réduira l’augmentation des subventions de fonctionnement octroyées par le gouvernement. Parallèlement, il se peut que la politique provinciale limite à 3 % la hausse annuelle des droits de scolarité. Disposant de peu de nouvelles possibilités de financement, les établissements d’enseignement n’ont d’autre choix que d’envisager d’autres mesures pour équilibrer leur budget, à savoir leurs dépenses.

Les dépenses les plus importantes assumées par les établissements d’enseignement sont les frais de personnel, qui comptent pour 66 % des dépenses des collèges et 73 % de celles des universités. Le salaire annuel moyen d’un professeur à temps plein d’une université ontarienne est de 152 000 $ et figure parmi les plus élevés au monde. Les salaires augmentent en moyenne de 4 % par année, ce qui est supérieur à la hausse annuelle des revenus de fonctionnement. Un moyen que prennent les établissements pour atténuer l’incidence des frais de personnel est le recours aux enseignants à temps partiel, qui représentent actuellement les deux tiers de l’effectif enseignant des collèges et la moitié de celui des universités. 

Par ailleurs, l’élimination de la retraite obligatoire en 2006 a entraîné une proportion accrue de professeurs universitaires âgés de 66 ans et plus. Cette proportion est passée à 9 % des professeurs à temps plein, alors qu’elle était presque nulle auparavant. Par contre, la proportion de professeurs âgés de 35 ans et moins a diminué de 9 à 5 %. Si la retraite obligatoire n’avait pas été abolie, 1 239 professeurs se seraient retirés au cours des 12 dernières années, libérant un nombre égal de postes pour de nouveaux enseignants. Cette seule mesure aurait généré des économies substantielles dans les charges salariales du personnel enseignant à temps plein par rapport aux dépenses actuelles. Le personnel enseignant principal n’est pas le seul au sommet de la courbe des salaires, mais à l’encontre de certains autres fonctionnaires provinciaux, sa rémunération n’est pas plafonnée. La plupart continuent de recevoir des augmentations d’échelon et, dans certains cas, ils peuvent bénéficier d’une pension pendant qu’ils continuent de toucher un salaire. Cela a de sérieuses conséquences non seulement pour la viabilité financière des établissements d’enseignement, mais aussi pour le renouvellement du corps professoral.

Le document renferme plusieurs recommandations visant à aplanir ces difficultés. Les salaires et les avantages sociaux sont déterminés dans le processus de négociation collective, et le COQES ne recommande nullement de restreindre les droits de négociation collective. Toutefois, les établissements pourraient mettre à la disposition de toutes les parties des renseignements complets sur les revenus et les dépenses durant la négociation collective et rendre public le coût intégral des ententes salariales, y compris les ajustements au coût de la vie négociés et les augmentations d’échelon. Pour sa part, le gouvernement pourrait octroyer aux établissements des subventions de fonctionnement pluriannuelles et établir une politique sur les droits de scolarité pour qu’ils puissent entreprendre une planification à long terme.

La prévention de la discrimination fondée sur l’âge est un principe important qu’il y a lieu de protéger. Toutefois, le gouvernement et les établissements pourraient mettre en œuvre des dispositions pour inciter les membres du corps professoral à prendre leur retraite à 65 ans, par exemple, leur interdire de cumuler salaire et pension, fixer des plafonds salariaux et éliminer les augmentations d’échelon pour les professeurs de plus de 65 ans. Ces mesures serviraient également à améliorer le taux de renouvellement du corps professoral.

Afin de relever les défis en matière de viabilité auxquels les établissements font face, ils peuvent tenir compte de la répartition de la charge de travail des professeurs à temps plein. Les gains potentiels seraient considérables. Les professeurs des universités de l’Ontario donnent environ 3,4 cours par session par année, et les professeurs qui ne participent pas activement à la recherche n’enseignent guère plus que ceux qui sont actifs en recherche. Si chaque professeur à temps plein donnait un cours supplémentaire d’un semestre par année, cela se traduirait par 13 500 cours de plus, sans frais supplémentaires pour le système. Si les professeurs qui ne sont plus actifs en recherche (13 %, selon une étude​ du Conseil des universités de l’Ontario) donnaient deux fois plus de cours que ceux qui s’activent en recherche, cela réduirait grandement le recours aux enseignants à temps partiel et augmenterait par le fait même la capacité d’enseignement de près de 10 %, sans frais supplémentaires.

Les établissements pourraient élaborer des mécanismes de rapport détaillé sur la charge de travail, qui comprendraient toutes les principales responsabilités professorales et suivraient les tendances de la productivité au fil du temps, afin d’orienter à l’avenir les négociations salariales et les dispositions relatives à la charge de travail.

Enfin, le secteur de l’enseignement supérieur doit déterminer et mettre en œuvre des moyens de mesurer la qualité pédagogique. Le COQES s’est engagé à élaborer des techniques d’évaluation à grande échelle qui mesurent directement les compétences et les aptitudes que les diplômés de niveau postsecondaire devraient posséder. Il est difficile de mesurer la qualité de l’enseignement, mais il faut entreprendre ce travail pour assurer l’avenir durable du système postsecondaire. Le COQES a récemment réalisé deux vastes études pour évaluer l’amélioration des compétences en raisonnement analytique, littératie, numératie et résolution de problèmes chez les étudiants des collèges et universités de l’Ontario à partir du moment où ils commencent leurs programmes jusqu’à leur diplomation. Les résultats de ces études seront publiés plus tard cette année.

Le document, La viabilité du système public d’enseignement postsecondaire de l’Ontario : Assembler toutes les pièces du casse-tête, est rédigé par Harvey P. Weingarten, Amy Kaufman, Linda Jonker et Martin Hicks du Conseil ontarien de la qualité de l’enseignement supérieur.